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Faire la paix ? Elaborer des stratégies alternatives
avril 2003, par
1- La notion de pacifisme, en tant que mouvement de pensée ou forme d’action, perd passablement de son acuité, dès que l’on sort d’une polarisation. La pacifisme n’aurait-il de sens que par opposition au bellicisme ? A un point que toute personne honnête, bien intentionnée et raisonnablement informée admet que la société et les être humains ont besoin d’harmonie, voire de paix et qu’ils ne peuvent en aucun cas, de façon générale, s’en passer. Ne resterait donc que la possibilité de la guerre juste, laquelle n’est légitime que si l’on trouve des gens pour la pratiquer et que toutes les autres alternatives ont été vainement utilisées.
2- Là où la question devient épineuse, ce n’est pas tant lorsqu’il s’agit de savoir si les moyens alternatifs existent (c’est le cas) et qui plus est s’ils ont été mis en œuvre, et de façon efficace, mais - et c’est là que devrait se situer le débat actuellement - lorsqu’il s’agit d’arguer de la légitimité d’une action belliciste. Or l’action belliciste, dans la mesure où elle est :
– soit hypocrite, (deux poids, deux mesures, absence d’exemplarité par sa propre action dans ce qu’elle attend des autres ; exemple : les Etats-Unis désarment-ils leurs engins de destruction massive ? Le désarmement qu’ils prônent envers d’autres, le pratiquent-ils eux-mêmes, ne serait-ce que dans un modeste mesure ?).
– soit qu’elle a révélé une faiblesse ou une ignorance lorsqu’il s’est agit de trouver des moyens dits préventifs,
n’est jamais réellement justifiable, à moins d’admettre ses erreurs passées et de se donner les moyens d’évoluer. Admettons-le, l’histoire sans humilité, sans dignité n’a aucun sens, elle n’est qu’une vaine répétition de destructives violences. Seuls les droits fondamentaux semblent apporter enfin un peu de légitimité à l’individu et à la vie. Encore faudrait-il appliquer à soi-même et à chaque individu concerné l’universalité pourtant proclamée.
Là où le pacifisme est ouvert et démocratique, là où il assume ses responsabilités vis-à-vis de chaque être humain et de l’environnement, le bellicisme est toujours masqué, ne serait-ce que parce qu’implicitement, il tolère de sa part ou de celle de ses opposants, des violations graves des droits fondamentaux, rendant ainsi impossible (sauf par lui-même !) la légitimation de sa propre action. Il n’y a donc en fait pas de guerre juste.
3- Ce raisonnement peut être poussé à son extrême. Toute l’humanité, si on lui proposait des solutions non-violentes efficaces (et si on commençait par un droit de l’homme à la paix ?), si on lui exposait la totalité des risques pour l’avenir, opterait pour une attitude que l’on pourrait qualifier de pacifiste.
4- Au-delà de la notion de pacifisme, et tout comme on a vu se développer de nombreux instituts d’études stratégiques, se développent enfin des organismes scientifiques d’étude de la paix, de ses causes, des façons de la promouvoir, etc.
En ce sens, le pacifisme dans la notion populaire du terme est relayé par un travail scientifique de plus en plus abondant qui devrait permettre à moyen terme de transcender la dichotomie que suppose le terme, pour parvenir à créer des sociétés "durables" et respectueuses des droits de tout être humain, présent et à venir. L’utopie de l’Etat non-violent n’est peut-être pas si distante. Reste bien évidement à y travailler, dans la dignité.
5- Au bout d’un moment l’argument se perd, devenu vain ou futile face à la beauté de la nature, du geste d’amour ou de la compréhension brute et unie de la vie et de son sens. Au-delà des discours et des théories, des terminologies, n’est-il pas plus simple de dire que la vie est faite pour créer de la vie et que la paix en est un moyen ? Mais cela, c’est à chacune et chacun d’y répondre, en son for intérieur et dans toutes les dimensions de sa vie !