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Bismarck et Beveridge
dimanche 11 juillet 2004, par
En Allemagne, entre 1880 et 1890, le chancelier Bismarck a lancé l’idée des assurances sociales, afin de faciliter le passage à l’état industriel, prendre en compte les idées sociales et asseoir l’unité nationale.
Le système "Bismarck", est appliqué par l’Allemagne et l’Europe centrale. Il se rapproche d’un système d’assurances : il est fondé sur le remboursement de prestations fournies par des praticiens librement choisis, et financé par des cotisations préalables. L’ouverture de droits aux prestations dépend de la qualité de cotisant de l’intéressé (et donc de ses revenus). La nouveauté fondamentale réside dans le caractère obligatoire et national de ces assurances et leur gestion par les partenaires sociaux.
Le système français est inspiré de Bismarck, mais il est en train de dériver vers le système "Beveridge".
Le Britannique Lord Beveridge [1] pose, en 1942, les trois grands principes d’un nouveau système de protection sociale : l’universalité, une couverture pour tout le monde ; l’uniformité, une aide identique pour tous (ouvriers et cadres supérieurs perçoivent les mêmes montants) sous la forme de prestations en espèces (indemnités maladie, allocations chômage, retraite), ainsi que de services gratuits ; enfin l’unicité, tous les risques doivent être couverts par un système unique.
Le principe d’unicité s’applique à l’organisation du dispositif et consiste à unifier tous les régimes d’assurances sociales en un système d’assurance nationale placé sous une autorité unique. Cette unité de gestion s’explique par l’universalité du système de protection mis en œuvre. Il résulte du principe d’universalité, une extension du champ d’application et une continuité de la protection tout au long de la vie, "du berceau à la tombe".
Le principe d’universalité, principale contribution de Beveridge à la conception moderne de la protection sociale, plaide pour une extension de la protection à tous les citoyens et à tous les risques sociaux. Les personnes protégées cessent d’être déterminées exclusivement par l’appartenance à la classe des travailleurs salariés. C’est désormais l’ensemble des citoyens qui est couvert mais c’est une "universalité sélective" malgré tout différenciant notamment travailleurs salariés (classe I), femmes au foyer (classe III) et personnes âgées (classe VI).
Le principe d’uniformité témoigne du refus d’introduire dans le domaine de la protection sociale les disparités de revenu. L’objectif principal du système de sécurité sociale est de garantir une protection égalitaire de base, et non de garantir le niveau de vie antérieur. L’amélioration éventuelle du niveau de protection est laissée à l’initiative des intéressés et relève de l’assurance privée (plus le niveau de protection "égalitaire" est bas plus cela renforce le poids des assurances et donc des inégalités).
Le système "Beveridge", est appliqué par l’Angleterre, la Scandinavie, et l’Europe méditerranéenne. Il est donc gratuit, financé par l’impôt, géré par l’État, et contrôlé par le Parlement. Le patient n’a pas le choix de son praticien ou de son hôpital. C’est la médecine nationalisée.
Source : Assedic
[1] Lord Beveridge - dont les travaux du début du siècle ont déjà conduit à l’adoption d’une loi sur l’assurance maladie, l’assurance invalidité et l’assurance chômage - pose, dans son rapport de 1942, les bases théoriques d’une nouvelle doctrine. Ce rapport constitue une étape fondamentale dans l’histoire de la protection sociale : W. Beveridge, Social Insurance and Allied Services, Report presented to Parliament by command of Her Majesty, November 1942, Agathon Press New York, 1969.