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Parution du n°41 : Produire autrement...

Et faire de lapolitique autrement !

dimanche 15 décembre 2013, par EcoRev’

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L’écologie politique possède quelques positions bien assises : il est devenu évident au yeux de toutes et tous que le mode de production capitaliste, désormais installé au niveau mondial, ne peut se perpétuer qu’au prix d’un épuisement des ressources de la planète et d’une marchandisation sans frein de l’activité humaine. De même, nous sommes toujours plus a être convaincus que le productivisme à outrance, la recherche du profit maximum, l’obsolescence programmée ou encore la publicité ne sont pas des fatalités, puisque démonstration est faite en de nombreux points de la planète qu’il est d’ores et déjà possible de produire, de faire, voire même de vivre autrement.

Un exemple d’actualité vient cependant sérieusement tempérer ces certitudes, celui de la Bretagne. Depuis plusieurs décennies maintenant, cette région a tourné le dos à son large front de mer pour vivre repliée vers l’intérieur sur l’industrie agro-alimentaire et l’élevage intensif. Relayée à Bruxelles par les lobbies productivistes, la Bretagne vit ainsi sous perfusion de subventions de la PAC. Zone d’activité enclavée « au bout du bout » du continent européen, ultra-spécialisée, elle n’a d’autre choix que d’entrer dans le système communautaire de libre-échange au prix d’un coût exorbitant au plan écologique. En effet, si la Bretagne produit des porcs à foison, l´Allemagne dispose en revanche d´un avantage comparatif décisif en matière d´abattage. Dès lors ce sont plus de 700 000 animaux qui font chaque année leur dernier voyage Outre-Rhin, au détriment de toute prise en compte des impératifs écologiques et à la faveur d’un dumping social qui ne dit pas son nom. De même, la production de poulets, qui s’est développée massivement en se destinant en grande partie à l´exportation, vient concurrencer la production des pays les plus pauvres, au point de participer à une nouvelle forme de colonisation. Travailler dans un abattoir industriel, c’est être condamné, compte tenu de la concurrence des pays à bas salaires, à vivre une vie de misère et en mauvaise santé dans un espace pollué ici comme ailleurs ! Un processus que l’on retrouve, entre autres, dans la filière textile, dont la catastrophe récente du Rana Plaza au Bangladesh est une illustration flagrante, des plus macabres.

Si l’affaire de l’écotaxe (péage routier) et la révolte fiscale qui l’accompagne en Bretagne, rappellent une fois encore que les problèmes sont parfaitement identifiés, elles révèlent aussi une limite sérieuse du discours de l’écologie politique sur la manière de penser le politique, a fortiori de faire de la politique. Sans doute, la politique passe-t-elle par la production de quelques idées, la promotion de quelques modèles, la suggestion de quelques pistes de réformes comme les contributeurs de ce numéro ont essayé de le faire, ce dont nous les remercions chaleureusement.

In fine, cela démontre ô combien la transition écologique est bien peu de chose sans une « transition politique » qui lui est intimement liée. Le mouvement des « bonnets rouges » souligne à cet égard les difficultés d’appréhender cette question avec nos catégories de pensée traditionnelles. Est-ce un mouvement populiste, identitaire et réactionnaire ? Est-ce l’amorce d’un séparatisme à l’image des luttes engagées il y a de nombreuses années déjà en Catalogne, au pays Basque, ou en Belgique ? Est-ce une révolte contre la fiscalité et l’État français ou la marque d’une incapacité de l’UE à organiser la solidarité entre régions riches et pauvres de l’Europe ? Probablement un peu de tout cela à la fois. On pourrait ainsi multiplier les interrogations témoignant que la politique ne peut se réduire à la participation (ou non) à un gouvernement quel qu’il soit, mais relève de mille et une dimensions (locale, régionale, nationale, européenne, etc.), de mille et une questions (économique, politique, culturelle, etc.) qui dépassent et de loin, cette approche obsolète du pouvoir et de la politique, de l’État et de ses institutions.

Ce numéro 41 d’EcoRev’ se veut donc être une étape sur le (long) chemin d’une réflexion cherchant à repenser les grandes questions de l’écologie politique à l’aune des rapports de pouvoir, des processus démocratiques d’organisation et de gestion des décisions, de la gestion des institutions ou encore de l’expression des intérêts. Ce sont là des thématiques que l’écologie politique devra, tôt ou tard, prendre à bras le corps si elle veut que la « transition écologique » ne soit pas qu’ une « belle idée » et si elle veut également, dans la continuité historique des mouvement syndicaux et sociaux, remporter la bataille qui a toujours été la sienne : celle pour l’émancipation.

Produire autrement...
Et faire de la politique autrement !

Dossier coordonné par Emmanuel Dessendier & Anita Rozenholc

– p. 2 - Éditorial
La rédaction

– p. 5 - Classique : Notes de voyage en écosocialisme
Joël de Rosnay

– p. 14 - Encart : Sources et ressources de l’écosocialisme
Michael Löwy

Dossier

– p. 17 - Un premier pas vers un changement radical de mode de production
Emmanuel Dessendier & Anita Rozenholc

– p. 28 - Encart : L’école des compétences : en sortir ?
Angélique del Rey

– p. 32 - Quelles stratégies politiques de transition pour la généralisation de l’économie contributive
Michel Bauwens

– p. 40 - Politique de la coopération
Patrick Dieuaide

– p. 45 - Une autre vie est possible : à propos du possible et de l’impossible
Joana Conill

– p. 56 - Civiliser la croissance : sortir de la crise par le haut
Dominique Méda

– p. 64 - Pour une transition industrielle aux mains des salariés
Evelyne Perrin

– p. 73 - Une politique industrielle de rupture au temps de l’Anthropocène
Jérôme Gleizes & Emmanuel Dessendier

– p. 83 - De l’échec soviétique à la conversion écologique
Pierre Delorme

– p. 99 - Réconcilier emploi et environnement, sortir des débats d’un autre temps
Corinne Morel Darleux

– p. 103 - Quel mode de production écosocialiste ?
Mathieu Agostini

– p. 112 - Plaidoyer pour l’altermonde
Jean Zin

Kit militant

– p. 123 - Une alternative au consumérisme numérique
Jean-François Rolez & Sarah Trichet-Allaire

Utopie(s) 2050

– p. 128 - L’utopie du collectif « un projet de Décroissance »

Lectures

– p. 137 - A. Münster, V. Gerber & P. Greboval